Au moins 29 personnes, dont deux Français, ont été tuées au cours d'une attaque revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique. Vendredi, des assaillants s'étaient mis à tirer dans deux établissements de la capitale burkinabé, avant de faire irruption dans l'hôtel Splendid.
Des hommes armés ont attaqué un restaurant et un hôtel deOuagadougou au Burkina Faso, vendredi soir, faisant au moins 29 morts. L'attaque a été revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique, dont au moins quatre djihadistes ont été tués lors des opérations. L'assaut des forces armées, qui avait débuté à 2 heures du matin, s'est achevé ce samedi en fin de matinée avec le soutien des forces spéciales françaises.
Deux ressortissants français ont été tués dans l'attaque djihadiste, a indiqué un porte-parole du ministère français des Affaires étrangères. Selon le Courrier Picard, l'un d'eux serait originaire du Val d'Oise et était en voyage d'affaires dans la capitale burkinabée. Une Française a par ailleurs été blessée, a indiqué le quai d'Orsay dans un communiqué publié avant l'annonce des deux décès.
Que s'est-il passé?
Vendredi vers 20h30, des assaillants se mettent à tirer en direction des terrasses de deux établissements, le Taxi-Brousse et le Cappuccino, situés sur l'avenue Kwame Nkrumah, une des principale artères du centre de Ouagadougou. Trois ou quatre assaillants "enturbannés et de type arabe ou blanc", selon un témoin, font ensuite irruption vers 20h45 dans l'hôtel Splendid, un établissement quatre étoiles fréquenté par des Occidentaux et par du personnel des agences onusiennes, mais aussi par les forces spéciales françaises lorsqu'elles sont stationnées dans la région. D'après les informations du Monde, une réception de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) avait lieu vendredi.
"C'est horrible, les gens étaient couchés et il y avait du sang partout. Ils tiraient sur les gens à bout portant", a expliqué Yannick Sawadogo, un des rescapés de l'hôtel. "On les entendait parler et ils marchaient autour des gens et tiraient encore sur des personnes qui n'étaient pas mortes. Et quand ils sont sortis, ils ont mis le feu", a-t-il ajouté.
Juste avant 2 heures du matin, dans la nuit de vendredi à samedi, un premier assaut a été donné par les forces burkinabées, soutenues par des militaires français. Les environs de l'hôtel se sont transformés en champ de bataille, avec de nombreux véhicules en flammes et la façade de l'hôtel en feu. A l'aube, l'assaut s'est poursuivi en face de l'hôtel, dans le café-restaurant Cappuccino, également lieu de rendez-vous des expatriés. Le ministre de l'Intérieur a signalé pendant la nuit que les sapeurs-pompiers avaient vu une dizaine de cadavres sur la terrasse de cet établissement.
Vers 4h30, alors que l'assaut était en cours, un ministre burkinabé a annoncé que 30 personnes avaient pu sortir "saines et sauves" de l'hôtel et que 33 blessés avaient été évacués. Parmi les rescapés figurait notamment le ministre du Travail Clément Sawadogo, présent à l'hôtel au moment de l'attaque. Les assauts dans les deux établissements se sont finalement achevés vers 9h30. 126 personnes ont été libérées, dont 33 blessées. En parallèle, un troisième assaut s'est déroulé dans un autre hôtel situé en face du Splendid, le Yibi. Les opérations se sont finalement terminées en fin de matinée, vers midi.
Dans un communiqué publié ce samedi, François Hollande a dénoncé "l'odieuse et lâche attaque qui frappe Ouagadougou". "Les forces françaises apportent leur soutien aux forces burkinabées", a ajouté l'Elysée, soulignant également que "le président de la République fait part de son total soutien au président Kaboré".
Qui est le groupe djihadiste Al-Mourabitoune?
Le groupe Al-Mourabitoune est né en 2013 de la fusion des "Signataires par le sang" de Mokhtar Belmokhtar - un ex-chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), cerveau d'une massive et meurtrière prise d'otages sur un site gazier algérien - et du Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un des groupes djihadistes ayant contrôlé le nord du Mali pendant près d'un an, entre le premier trimestre 2012 et début 2013.
Cette cellule terroriste a récemment prêté allégeance à Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi). Selon SITE, une organisation américaine qui surveille les sites internet islamistes et rapporte l'information, le groupe terroriste a posté un message sur la messagerie Telegram.L'ambassade de France avait évoqué très rapidement une "attaque terroriste", mettant en place un numéro d'urgence pour la communauté française. Le vol Air France Paris-Ouagadougou a été dérouté vers le Niger voisin.
Dans un enregistrement audio diffusé par la cellule médiatique d'Aqmi, issu d'une conversation entre un des assaillants et un représentant de l'organisation terroriste, un des assaillants a annoncé "agir pour venger le Prophète", d'après la traduction faite par le chercheur Romain Caillet. Il aurait également proféré des menaces à l'égard de la France, tout en indiquant que 30 "croisés", dont des Européens, auraient été tués au cours de l'attaque à Ouagadougou.
Que sait-on des victimes?
Aucun bilan officiel n'a, pour l'heure, été donné. Mais selon les autorités locales, au moins 29 personnes auraient été tuées dont deux Français et deux Suissies. Par ailleurs, 150 personnes de 18 nationalités différentes auraient été évacuées. "Sur la terrasse du Cappuccino, les sapeurs-pompiers ont vu une dizaine de cadavres", a déclaré le ministre de l'Intérieur, Simon Compaoré.
Parmi les blessés figure une photographe franco-marocaine, Leila Alaoui. D'après l'ONG FIFDH, la jeune femme aurait été opérée et "son état semble stable".
Par ailleurs, un couple originaire d'octogénaires originaire de Perth en Australie et installés dans le nord du Burkina Faso a été enlevé. Leurs ravisseurs appartiendraient à Aqmi et auraient pour objectif de les emmener au Mali voisin.
Dans quel contexte intervient cette attaque?
Le pays a subi dans l'après-midi une première attaque d'un groupe d'une vingtaine de personnes lourdement armées qui ont tué un gendarme et un civil dans le nord du pays, près de la frontière avec le Mali, selon un communiqué de l'armée. Cette attaque a lieu moins de deux mois après celle de l'hôtel Radisson Blue à Bamako au Mali, qui avait fait 20 victimes. Elle avait alors été revendiquée par le groupe djihadiste Al Mourabitoune. Pour autant, une attaque de cette ampleur reste inédite dans la capitale burkinabé.